Ta vie, elle te vend pas du rêve, le concept même d'existence au sein d'une société t'a toujours laissée perplexe. Toi, t'aurais rêvé de faire comme dans les films d'action que tu regardais quand t'étais môme. Un flingue dans chaque main, une bonne tirade balancée à une blonde lambda et tu serais partie pour ton baroud d'honneur. Sauf que t'as pas d'honneur à laver. Puis t'es pas ménagère non plus. Blague misogyne, bonjour. T'aurais fini en taule, recouverte du sang, pas le tien, bien entendu. C'est pas glorieux comme avenir. C'est juste que ça rend foutrement bien à l'écran et que toi, t'as envie d'avoir la même classe que ces mecs qui passent leur vie à vivre des existence impossibles. T'as mis un point d'honneur à t'écarter du chemin que la vie a tracé pour toi et 'faut le dire, pour ça, t'as vraiment un don. Ton histoire? Même son début il est chiant. T'as été conçue le jour où une petite secrétaire a dit oui à son patron. Une simple histoire de cul au boulot qui n'a même pas eu la décence de se finir en plainte pour harcèlement. Plus qu'à un film d'action ça ressemblait à un scénar' de film à l'eau de rose. A faire gerber un bébé phoque. T'étais même pas née que la petite maison dans la prairie, sa chiée de mioches et ses huit chiens te pendaient au dessus de la tête. T'aurais repris l'affaire familiale, ou épousé un homme encore plus riche que ton père. T'aurais fini comme tous ces visages anonymes qui se complaisent dans leur petite vie bien rangée. Ils te connaissaient même pas qu’ils t’avaient déjà condamnée au bonheur, ces cons. Y a un truc qu'à pas du tourner rond lors de ta conception. T'as pas d'excuses derrière lesquelles te planquer, y en a qui n'ont pas de parents pour les guider dans la vie, toi t'avais tout... C'était probablement ça ton problème, t'as fini par t'en inventer. Mais bon, heureusement que t’es née avec un don, celui de tout faire foirer, sinon tu serais morte, noyé dans ta propre bile d’allégresse. Oh Cass'… Comment es-tu devenue aussi amère ? Ah ouais, c’est vrai, fallait que vos histoires se rejoignent. Tu t'es donné du mal pour arriver là où t'en étais. Même ça, ils l'ont foutu en l'air. Académie d'élite. Angleterre. L'enfer. T'as rien d'Alice, 'y a pas de merveilles ici, mais t'as l'impression d'avoir atterrit chez les fous. Tout te semble étranger et étouffant. Elle n'est plus là pour te pomper l'air et ça te manque horriblement. Alors tu te raccroches à la seule chose qui te semble familière, tes bouquins et des bribes de souvenirs qui s'effacent.
T’as vu le jour dans le berceau du Jazz, tes premières années furent bercées par les saxos et les rires s’élevant des bars de la rue Bourbon. Tu pouvais pas courir dans les rues, alors t’avait tenté d’escalader l’immeuble en passant par la fenêtre un jour… Ta nourrice s’était fait virer à cause de cette histoire et puis vous aviez quitté la ville pour vous rapprocher des champs de coton de ton père. Les rires et les effluves de nuits sans fin ont laissé place à l'odeur de canne à sucre brûlée et de vanille séchée. La maison était de plein pied, y avait un jardin, mais tu tentais toujours de grimper sur le toit, la gueule que tes parents avaient affiché ce jour là avait dû te plaire, ou tu devais pas aimer ta nouvelle nourrice. Enfin, peu importe, ça t’éclatait de voir le monde de haut. T’avais l’impression qu’il t’appartenait, qu’il était bien plus grand. A l’époque il se résumait à quelques hectares de champs d’ouate, tes parents, quelques domestiques et l’école. (à compléter plus tard, je fais des textes à trous)
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_ Stan il est troooop beaaaau ! Les autres filles acquiescent avant de partir sur un nouvel et éternel débat sur le classement du plus beau garçon de la cour de récré. T'observe distraitement la fillette noyée sous les frous-frous, t'écoutes pas vraiment, t'as jamais vraiment d'avis sur la question, faut dire que ça t'intéresse pas vraiment. Un cri retentit plus loin, puis un bruit sourd venant étouffer les interminables jacassements de tes camarades de classe.
_ Hé les filles! Je peux ravoir la balle?! T'observes le ballon à tes pieds pensive avant de donner un coup dedans, cette sensation, elle te fait un bien fou, les mines impressionnées des garçons aussi. Ce soir là, t'es rentrée les jupons pleins de boue, tous les soirs qui ont suivit aussi jusqu'à ce que tu soies en âge de les troquer pour des pantalons au grand dam de ta mère. La poupée, c'était pas pour toi, la dînette encore moins, l'excitation de coller ton poing dans la figure de ton voisin ou de frapper un ballon par contre, ça, ça te donnait la sensation d'être en vie, d'enfin arriver à respirer.
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_ Hé rend moiiii çaaaa !!!
_ JAAAAMAIIIIS! ! Les jupes c'est pour les filles, d'abord!
_ CHUI UNE FIIIILLEUH, ABRUTIIIII !!
_ CASSIDY ! TON LANGAGE !Tu laisses échapper un grognement dépité en arrachant le pan de tissus des mains du garçon avant de lui mettre un taquet dans l'épaule sans te soucier du regard courroucé dont te couve la maîtresse. Tu rejoins April en brandissant ton trophée, un sourire con imprimé sur les lèvres. Les autres filles te lancent un regard noir, elles n'aiment pas que tu traînes avec les garçons, April est la seule que tu supportes. Elle n'est pas tout à fait comme toi, mais pas du tout comme les autres. Tu soupires te laissant tomber à ses côtés, enfilant le tutu de tule rose sur ta tête en grognant.
_ Qu'iil est chiiiiant ! - April lance un regard en coin à l'intéressé, pensive, avant de hausser les épaules.
_ Il doit être amoureux... - Ton regard suis le sien jusqu'à rencontrer celui de Stan qui t'adresse un large sourire avant de retourner aux préparatifs de la pièce de théâtre.
_ Il est fou de moi ! - Tu laisses échapper un rire amusé avant de revenir à ton amie, amusée. -
Quoi? T'es jalouse? - Elle répond pas, se contente de t'attraper le col et de t'embrasser. Ton cerveau se fige un instant dont elle profite pour fuir en riant. -
HA MAIS BARK ! T'es trop dégueux !!! - Tu te lances instinctivement à sa poursuite en riant.
Dis-moi, Cass', ça fait combien de temps que t'as pas rit aux éclats? Juste comme ça, sans raison, juste par-ce-que tu peux plus contenir ta joie.
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_ Cassidy, Stan, reprenez je vous prie.Tu soupires, saisissant le livre d'April qui t'indique la ligne du doigt avant de lire sans entrain.
_ Ha ! ha ! vous êtes vertueuse ! - Le jeune homme prend la suite d'une voix ridiculement haute.
_ Monseigneur ! - Le professeur vient vous interrompre.
_ Mh très bien... Mais Cassidy, c'était la ligne d'Hamlet, tu es Ophélie. - Tu lèves les yeux au ciel lâchant dans un grognement un :
_ Mooonseigneeeeureuh ! - Quelques ricanements s'élèvent depuis le fond de la salle.
_ Et vous êtes belle ! - Une petite voix rententit.
_ En fait c'était plus crédible quand c'était elle le garçon ! - Hilarité générale, tu fusilles du regard la rouquine, attrapant le livre et t'apprêtant à le lui lancer à la figure. La main d'April se pose sur la tienne, la ramenant sous le bureau. Tu te contentes de grogner en t'enfonçant sur ta chaise.
_ T'as qu'à la faire toi, Ophélie, et aller te noyer dans ta robe, connasse...La lecture continue, vos doigts s'entremêlent sous la table, à l'abri des regards. Tu fermes les yeux, ce contact il te fait un bien fou.
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