Cherish your vision, I'm the one who want to have your eyes... [PV : Eugène]

Tysha K. Reed
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Dim 20 Déc - 13:25
Je tape frénétiquement sur mon clavier pour finir à temps un travail que Ted' m'avait demandé. Des petits pois chevauchent ma vision à chaque fois que je tape sur le clavier, la nuance de vert changeant selon le son produit par les touches. À vrai dire, je tape tellement vite que ma vision est actuellement mouchetée de plein de petits pois de différentes nuances de vert se superposant les uns aux autres. Pour la énième fois de cette nuageuse matinée de samedi non pluvieuse, ma main disparaît dans un sachet et en ressort avec une sucette au citron vert que j'enfourne sec entre mes lèvres. Mes doigts tapent de plus en plus vite, et après un appui final sur la touche entrée une explosion de bleu envahit mon champ visuel. Ma tête vient de tomber lourdement sur mon bureau. J'ai fini.

T'as mis treize heures pour mater ça ?
Mais t'es une loque humaine, bastard, t'aurais pu mettre une heure si t'avais utilisé tes méthodes illégales habituelles.
Quoi, tu veux pas te comporter en enfoiré quand ça concerne ton père ?
... Mais t'es qu'un abruti, tu restes quand même un enfoiré quoi que tu fasses. Tu veux être con en plus, bastard ?

- J't'ai pas sonnée wanker mind, ta gueule.

Une tâche vert olive ponctuant la sonnerie du rez-de-chaussée m'interrompt brusquement et je relève la tête. Il est quelle heure ? Onze heures quarante-neuf ? Je mets l'ordinateur du client dans sa sacoche, que j'enfile sur mon épaule. Qui que ce soit, il va devoir attendre, je dois rendre l'ordinateur pour midi trente à la boîte de mon père. Nouvelle tâche vert olive accompagnée de la sonnerie de la maison. Je soupire passablement, une main dans ma prolixe chevelure blond platine. Je défais mon chignon et brosse conscieusement mes cheveux que je coiffe en queue de cheval haute. Prenant ma veste en cuir noir à l'entrée avant de mettre l'étui de mon violon ( avec l'instrument à l'intérieur évidemment ) sur mon épaule, j'ouvre la porte et un léger sourire vint agrémenter mon visage de marbre taillé dans une glace frigorifiée.

- Dormouse. It's been a while.
- Salut Cath'. Tu t'apprêtais à sortir ?
- Ouaip. Le boulot. Tu voulais quelque chose... ?
- C'est interdit de te parler maintenant ?
, demande-t-il avec un sourire taquin et en bâillant trois secondes plus tard en me faisant rire.
- Va dormir sur le canap' du salon que t'aimes tant, on parlera à mon retour. Sans doutes ce soir, faut que je cause aux têtes de mort ailées.
- Okay. J'ferme à clef de l'intérieur alors. Have a nice trip.
- Have a nice sleep.


Une petite accolade de faite, et me voilà parti. Dormouse a toujours le don de me mettre de bonne humeur, avec son envie de dormir tout le temps. Enfin, quelque chose a dû lui arriver pour avoir eu envie de dormir au pas de ma porte... Hm. J'y penserai plus tard. Je vais directement à la boîte après avoir mangé dans un restaurant gratuitement ( ben quoi, je connais le cuistot j'en profite eh ) et je donne l'ordinateur au client en lui montrant tous les changements opérés, ainsi que ce qu'il doit faire ou ne pas faire désormais. Je le remercie de sa confiance, blablabla, toutes les commodités d'usage habituelles, et là je fais un terrible constat en fouillant dans mon sac. Plus de sucettes au citron vert. Je fouille et découvre tout de même une pastille au citron vert que je fais glisser sur ma langue en plissant les yeux. ... C'est la dernière. C'est quoi ce délire ?


Toutes les bonnes choses ont une fin tu sais.
Enfin, le fait que tu sois un enfoiré ne changera jamais.
Eh, si tu essayais de t'étouffer avec cette pastille ? J'suis sûr que ce serait efficace !
Quoique, si tu pouvais tuer la demoiselle en face de toi avant de mourir asphyxié, là ce serait even better.

- Shut the hell up, wanker mind.

Je dis en sortant dans la rue, tandis que ladite demoiselle me regarde bizarrement. Je lui renvoie un regard froid et me dirige automatiquement vers la confiserie la plus proche... Fermée le samedi. Quoi ? Je vais dans deux ou trois autres confiseries que je connais bien... qui sont tout aussi fermées que la première. Quoi ?! Je me dirige alors vers ma confiserie préférée... qui est fermée exceptionnellement ce samedi. What the fuck is goin' on, bloody git ?! Je regarde la pancarte annonçant la fermeture en lui lançant des éclairs gelés de mes yeux légèrement plissés. C'est un complot ? Un plan pour ruiner mon cerveau ?


Ou juste un moyen de te faire comprendre que t'es un enfoiré.
Ou encore pour montrer au monde à quel point t'es pire qu'un enfoiré.
Ouais, dans les deux cas ça semble bien marcher...

- Oh toi ta gueule.

Je lance de mon soprano cristallin pareil à une mélodie d'une gamine de quatre ans. Mon visage et mon ton restent excessivement calmes et froids. Je n'ai juste pas remarqué qu'un monsieur était pile en face de moi quand j'ai demandé à ma connasse de conscience de la fermer, donc forcément il croit que je lui ai causé à lui. Qu'il est con... D'ailleurs, il y a deux monsieurs. Qu'un détail. Quand le premier plisse les yeux et demande des explications, tout en ayant un ton qui me tape sur les nerfs, je le pousse très rapidement et surtout très violemment sur le côté, et il percute le deuxième monsieur, blond avec un parapluie transp-... Oh. Putain. Mr Swanson. Qu'est-ce qu'il fait là ?

- Bordel meuf, tu peux pas t'excuser quand tu pousses quelqu'un ?! Et d'où tu ordonnes aux autres de la fermer en mode random ?! Le respect tu connais non ?!
- Bonjour, monsieur. Visiblement, seuls ceux qui connaissent les bienfaits des sucettes au citron vert connaissent le respect... D'autre part, je vous informe que vous gênez le passage. Dégagez. Au revoir, monsieur.


Je lance de ma voix de gamine de quatre ans, véritable soprano cristallin et carillonnant qui résonne avec froideur et un brin d'insolence à peine visible ( juste à peine... ). Le premier monsieur secoue la tête, agacé, et décide de partir. Bon choix. Je siffle furtivement, exaspéré de ce complot du destin. Il est midi quarante-trois. Et aucune confiserie que je connais bien n'est fichue d'être ouverte un samedi. Je m'adosse aux portes fermées de la confiserie en plantant mes ongles dans les paumes de mes mains.


Haha, comme prévu, il en faut beaucoup pour briser le calme d'un enfoiré.
Au moins t'arrive à te contrôler, c'est bien.
Ah tiens, si tu te maîtrises, tu veux pas tuer tous les passants de cette ruelle ?
Ouais, avoues qu'ils sont chiants à faire autant de vacarme.

- Tu vas la fermer wanker mind, oui ou merde ?

Je murmure en passant une main dans mes cheveux. Heureusement que je sais garder mon calme, voilà bien longtemps que je serais mort sinon. Je respire alors mes vêtements, le parfum de pivoine apaisant mon exaspération qui commençait à s'ancrer. Respirant profondément, de nouveau parfaitement calme et apaisé, je cherche mentalement une confiserie qui puisse être ouverte. Je regarde mon ancien professeur de philosophie qui, lui, est toujours là. Je ne cherche pas à lui adresser la parole pour autant. Je n'ai plus envie de parler pour le moment.

©Riva

Eugène Swanson
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Mar 26 Jan - 20:28




C’était une belle journée qui commençait à nouveau en ce samedi matin. Non pas dans le sens où il faisait beau, à vrai dire, je n’étais véritablement certain de l’humeur du ciel, mais il ne me semblait pas que le soleil soit venu nous honorer de sa présence.  Je supposais plutôt un ciel gris, souvent de coutume sur cette magnifique île qu’était l’Angleterre. Il avait beau ne pas pleuvoir ou faire un temps radieux, cela ne m’avait point empêché d’emporter avec moi mon parapluie aux fibres transparentes. La météo pouvait se révéler aisément changeante ici, bien que nous demeurions loin des côtes, et grâce à lui je ne serais ainsi surpris ni par l’un ni par l’autre. Si les cieux venaient à pleurer, je serais ainsi protégé de l’averse et si l’astre des jours se décidait à illuminer nos existences de ses doux rayons, ceux-ci ne feraient aucun mal à ma peau blanche aussi fragile qu’un tapis de neige. Sans oublier que les nuages ont été nombre de fois de faux amis qui m’ont bien souvent trompé. Il arrive qu'ils soient bien plus clairs et fins qu’on ne les imagine, et ne pouvant déterminer de mes propres yeux leur densité, il valait mieux pour moi prévenir que guérir. Je me soucie de toute manière peu de ce que pourront penser les passants qui me verront arborer un parapluie alors même qu’il ne pleut pas, je ne suis plus à une différence près, j’ai de tout temps attiré les regards. La transparence du matériaux n’avait aujourd’hui plus d’utilité pour moi mais il était un souvenir bien trop cher à mon cœur pour que je songe un seul instant à m’en séparer.
Je déambulais donc tranquillement dans les rues de Londres, profitant d’une marche matinale que j’aimais renouveler chaque semaine en ce même jour. Plutôt que de rester cloitré entre les quatre murs de mon appartement, je me complaisais à aller respirer l’air extérieur et profiter d’une légère brise venant caresser tendrement mon visage et mes cheveux. Cela me rappelait les longs moments que nous avions l’habitude de passer ensemble à nous promener dans notre village natal. J’ai toujours aimé rester dehors, moi qui ai longtemps été confiné chez moi à cause de ma maladie. C’est toi qui m’as poussé à sortir, toi qui m’y as donné goût, toi qui m’y as aidé, notamment avec ce parapluie…

Mais plus que de prendre du bon temps, je le rendais bénéfique, puisque par la même occasion je m’en allais faire mes courses pour la semaine. Je ne me rendais point au centre-ville, j’évitais lorsque je pouvais m’abstenir d’arpenter ces rues bruyantes qui me déstabilisaient et me faisaient perdre mes repères avec tous ces sons perturbateurs. Je préférais les ruelles plus calmes qui entouraient le quartier résidentiel où j’habitais. J’y avais d’ailleurs trouvé de nombreux commerces de proximité dont les gérants étaient des plus bienveillants à mon égard, ce qui était  important pour moi qui ne pouvais arpenter seul les rayons d’un magasin. J’avais confiance en eux et je savais que loin de m’arnaquer, ils m’aidaient du mieux qu’ils pouvaient, se révélant même souvent bien trop généreux, au point de me mettre mal à l’aise. Il n’en était pas de même pour les marchés de grande surface qui ne faisaient que peu de cas de leurs clients.
C’est ainsi que j’avais passé la porte d’une petite épicerie locale que j’affectionnais tout particulièrement. Le propriétaire avait toujours la bonté d’être très avenant, mais surtout, amical et naturel, d’autant que ses produits étaient de qualité. Je passais donc un agréable moment, sa femme avait même fait son apparition en me proposant d’emporter avec moi un gâteau qu’elle avait confectionné et que je pouvais difficilement refuser. Ce simple moment ravivait toujours la joie en mon cœur, plus encore lorsque leurs deux enfants venaient me poser mille et une questions en s’accrochant à mes jambes alors que leur père m’accompagnait dans les allées.

Je fus même gracieusement invité à leur table, et ce fut donc après ce délicieux repas que je retournais chez moi alors que midi était passé, les remerciant une énième fois tout en leur proposant de leur retourner un jour leur grande générosité. Il y avait des personnes si braves en ce monde.
J’avais le sourire aux lèvres, très loin du sentiment d’avoir perdu ma matinée, je marchais tranquillement, mon sachet de provisions en main, lorsque soudain, on me percuta violemment, me faisant perdre l’équilibre que je n’avais pas, manquant de me faire tomber. Avec ma cécité, j’avais un handicap certain comparé au commun des mortels pour me rattraper dans ce genre de situation et il était clair que si par miracle je n’avais pas eu mon parapluie en main pour me soutenir à la manière d’une canne, ma chute aurait pu être bien plus dramatique.

- Bordel meuf, tu peux pas t'excuser quand tu pousses quelqu'un ?! Et d'où tu ordonnes aux autres de la fermer en mode random ?! Le respect tu connais non ?!

- Bonjour, monsieur. Visiblement, seuls ceux qui connaissent les bienfaits des sucettes au citron vert connaissent le respect... D'autre part, je vous informe que vous gênez le passage. Dégagez. Au revoir, monsieur.

Cette bagarre de rue ne m’aurait pas autant interpelé si soudainement, la voix qui s’éleva pour répliquer à la personne qui venait de me bousculer ne vint titiller ma mémoire. J’étais certain que ce ton clair m’était familier. Cela se confirma plus encore lorsqu’une douce odeur de grenade mêlée à une senteur fleurie arriva jusqu’à moi. Aussitôt, comme un automatisme, un nom me revint à l’esprit. Mary Catherina… C’était un élève que j’avais eu à l’université, non pas une fille comme son timbre aigu pourrait le faire entendre, mais bel et bien un jeune homme, un des meilleurs de sa promotion, il m’était difficile de l’oublier. Bien que je n’avais pas tant entendu le son de sa voix durant mes cours, j’avais toujours été agréablement surpris des notes qu’il méritait lors de ses contrôles. Il avait des capacités d’analyses et de réflexion assez impressionnantes. Malheureusement, je n’ai plus eu le loisir de le croiser à nouveau une fois les diplômes passés. Cet élève avait disparu de l’établissement, alors même qu’il avait toutes les chances de réussir dans ses études supérieures avec son niveau. Je me souvins que c’était tout particulièrement Joan qui avait été attristé de la perte d’un si bon élève. C’était d’ailleurs lui qui m’avait appris une chose qui m’empêchait d’oublier cette personne.
J’avais découvert qu’il avait un regard unique sur le monde. Un regard qui m’interpelait, qui me fascinait.

Des pas se firent entendre et la seconde odeur s’amenuisa petit à petit, m’indiquant que mon bousculant qui n’avait même pas pris la peine de s’excuser auprès de moi, sans doute sous la déraison de la colère, s’en était allé. Mais demeurait ce parfum délicat de rose et cette présence que je pouvais ressentir non loin devant moi. Si mes souvenirs étaient exacts, c’était une confiserie qui se trouvait là. Il m’arrivait souvent de sentir des effluves sucrées en passant dans cette rue. Mais aujourd’hui elles étaient moindres, signe que la boutique devait être fermée.


- Tu vas la fermer wanker mind, oui ou merde ?


Ce qui m’inquiétait, c’était que je ne constatais aucune autre présence que la nôtre dans cette rue, mis à part quelques passants dont j’entendais les démarches diverses se presser un peu plus loin derrière moi. Il était clair que mon cher ancien élève ne parlait à personne, à part sans doute lui-même. Et son ton ainsi que ses propos ne me laissaient pas croire qu’il se portait pour le mieux. Il m’était impossible de ne pas m’inquiéter pour cette personne, encore moins de la laisser ainsi, mais par peur de le déranger, j’osais à peine m’avancer vers lui.

- Catherina ?


Mon visage exprimait cette légère inquiétude qui accaparait mon être. Je n’avais aucun doute sur la personne qui se trouvait en face de moi, aussi m’étais-je permis de l’appeler par son prénom.  Il était possible que je me fourvoie, mais, l’ouïe et l’odorat étant aujourd’hui mes seuls repères dans ce monde monochrome, il était bien rare qu’ils me faussent. Plus encore lorsqu’il s’agissait de reconnaître l’un de mes élèves. J’avais développé une capacité toute particulière pour cela, évitant ainsi de me faire avoir par leurs nombreuses farces dont ils avaient le secret, comme par exemple celle de changer de place dans le but de me déstabiliser, plaisanterie qu’ils affectionnaient tant. Il me fallait assimiler très rapidement quelle voix correspondait à quel nom, et quelle odeur je pouvais lier à quelle voix. Grâce à cela, l’identité d’une personne m’était devenue aisément reconnaissable.

- Est-ce que tout va bien ? Puis-je faire quelque chose pour toi ?

Bien entendu, j’aurais voulu que mes premiers mots à son encontre soient tout à fait différents, et que je me réjouisse de retrouver ainsi par hasard un de mes anciens étudiants que je n’avais pas croisé depuis une éternité. Mais je pressentais que quelque chose n’allait pas. L’aura qui émanait de lui était plus austère encore que celle que j’avais eu l’habitude de côtoyer. Pour ne pas le brusquer, je restais à une distance raisonnable de lui, mais je m’étais tout de même rapproché afin de montrer mon intérêt à son égard.




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Mar 26 Jan - 22:29
Je respire profondément le parfum de mes vêtements et, quand la douce odeur de pivoine achève de plonger mes nerfs dans une plénitude parfaite, j'ouvre de nouveau les yeux. La première chose que je vois est une explosion de fuschia dégueulasse due à un brusque crissement de pneus. Je m'apprête à pester en silence, mais à la place je respire de nouveau ma propre odeur. J'ignore littéralement ma connasse de conscience qui me suggère de faire exploser les voitures et qu'une fumée fuschia en sorte. Quelle connasse, celle-là...

Alors que mon regard se perd dans le vide, un trait de peinture ( semblable à un pinceau large qui étale doucement sa peinture sur un mur ) doux d'une étonnante couleur qui mélange indigo et magenta m'interrompt. Cette couleur si particulière m'était familière, c'est celle de la voix de mon ancien professeur de philosophie. Je lève alors la tête vers lui et je découvre un visage inquiet. Je fronce les sourcils, plissant légèrement les yeux, mais je ne réagis pas. Je me demande seulement quel est ce délire qu'ont les gens d'aider la première personne qu'ils estiment être dans le besoin immédiat d'une aide extérieure. Abrutis, on vous a pas sonné aux dernières nouvelles.


J'te rappelle qu'ils ne sont pas aussi enfoirés que toi.
Heureusement que t'es unique en ton genre, hein...
Tiens, c'pour ça que t'es si faible.
Tu veux pas faire exploser cette ruelle ? Au moins tu deviendras fort.
Bon, tu seras toujours un enfoiré, mais depuis l'temps t'es habitué, bastard.

Je soupire légèrement mais longuement. C'est décidé, ma connasse de conscience causera dans le vide aujourd'hui, elle me gave là. C'est alors que je me souviens que si j'ai entendu la couleur de la voix de Mr. Swanson, c'est qu'il m'a parlé ; et le seul mot qu'il a dit me revient brutalement dans les oreilles. Mon prénom. Mon prénom en entier, dit par une voix qui n'était que douceur et inquiétude... et une couleur aussi particulière que sincèrement belle et intrigante. Je ne bouge toujours pas, je n'en sens ni le besoin immédiat ni l'utilité. J'envoie valser toutes mes pensées actuelles pour me concentrer sur le véritable problème ; quelle confiserie est normalement ouverte le samedi ? Je me creuse les méninges, établissant de nouveau dans ma tête un plan détaillé de la ville de Londres.

Et alors que j'ai envoyé paître toute pensée sur mes cours de philosophie datant de l'époque où j'étais encore en licence, ou bien des souvenirs que j'ai de Mr. Swanson, ou bien de la couleur de sa voix qui m'était si particulière, et que je me concentre pour trouver une confiserie ouverte parce que c'est ma première priorité... quelque chose vient tout chambouler, même si je n'en laisse rien paraître. Que vient-il de me demander ? Si j'ai besoin d'aide ? C'est quoi cette question ouverte plus vaste que le monde ? J'arque un sourcil interrogateur en sachant pertinnement qu'il ne le verrait pas, mais je reste froid de A à Z. De manière générale, je n'ai pas besoin d'aide. Et puis quoi encore... Je décide donc de ne répondre qu'à la première question.

- Bonjour, monsieur. Ne vous en faites pas, je vais bien. Je cherche seulement une confiserie ouverte, trois de celles que je connais sont fermées.

Est-ce que j'ai eu la connerie de penser que je ne voulais pas parler tantôt ? Oui ? Que je suis con. Ta gueule connasse, j't'ai pas sonnée. Il se rapproche un peu, sans bruits, alors que j'analyse la propre phrase que j'ai dite en plongeant dans l'abysse de mes souvenirs. De mémoire, je n'ai jamais vouvoyé quelqu'un que je ne respectais pas plus que la normale. J'entends par là que je tutoyais Mr. Douglas, mon ancien prof de peinture, mais ça ne signifiait pas que je ne le respectais pas pour autant. Disons que... Mr. Swanson était le seul que j'avais vouvoyé. Sa douceur, peut-être ? Je secoue la tête pour définitivement enlever ces pensées de mon esprit. Vaines et futiles.

- Et vous, vous allez bien monsieur... ?

©Riva

Eugène Swanson
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Mer 10 Fév - 8:31




- Bonjour, monsieur. Ne vous en faites pas, je vais bien. Je cherche seulement une confiserie ouverte, trois de celles que je connais sont fermées.

Loin de me froisser par la froideur qui se dégageait de lui, j’essayais de comprendre ce qui  le rendait inhabituel à mes sens, ce qui, malgré son affirmation d’aller pour le mieux, m’incitait à croire le contraire au vu de l’aura qu’il dégageait. Ainsi donc cherchait-il  une confiserie ? Cela expliquait sa présence en face de ce magasin laissant d’ordinaire s’échapper des effluves sucrées depuis ses portes grandes ouvertes. Ce n’était pas une boutique que j’avais l’habitude de fréquenter, mais je pouvais cependant attester de son succès auprès des jeunes dont j’entendais toujours les rires avoisiner cette vitrine qui devait montrer à leurs yeux mille et une saveurs délicieuses. Derrière son masque d’adulte Catherina serait-il resté un grand enfant ? Ce n’était pas quelque chose que je considérerai comme un défaut, bien au contraire. Les enfants savent des choses que nous aujourd’hui avons oubliées. Une innocence, une vision du monde bien plus belle et peut-être bien plus juste que nous le croyons. Ils savent profiter pleinement des choses. Bien que je n’aie pas la même impulsivité qu’eux, j’essaie de me satisfaire au mieux de ce que la vie m’offre, d’être heureux comme je le peux, avec ce que j’ai. Je suis parfois empreint d’une naïveté que l’on peut me reprocher, je le conçois, mais j’aime m’inspirer de l’optimisme dont font preuve les plus jeunes, qui à mes yeux sont des êtres purs et plus clairvoyants qu’il n’y paraît.

- Et vous, vous allez bien monsieur... ?

Sortant de mes pensées dont la philosophie me rappellerait presque des notions abordées dans mes cours, je fus, je dus l’avouer, légèrement surpris de ce retournement de question, mais ce plutôt agréablement. Je ne me serais pas étonné s’il avait voulu me congédier de manière un peu plus directe et moins polie, après tout, peut-être le dérangeais-je, et si son humeur n'était pas au mieux de sa forme j’aurais été tout à fait compréhensif. Il était vrai qu'il m’arrivait rarement de m’offusquer pour quelque chose…cela à cause d’une empathie qu’on considèrerait sans doute elle aussi comme une faiblesse. Je préférais cependant la voir comme une force.  

Je lui offris un sourire qui se voulait des plus doux, traduisant par-là même l’absence de mes problèmes.

- Je vais pour le mieux, je te remercie.
Cette journée m’offrait de belles surprises, comme celle de retrouver un ancien élève dont je n'avais pas eu de nouvelles depuis bien longtemps.


J’aimerais tant pouvoir le questionner sur ce qu’il devenait aujourd’hui. Je ne pouvais nier cette curiosité qui m’étreignait. En tant que professeurs, ne souhaitons-nous pas le meilleur pour l’avenir de nos protégés ? Or Catherina avait disparu de l’école alors qu’il aurait pu continuer de brillantes études au vu de son talent. Je me demandais s’il avait trouvé une voie qui lui correspondait et dans laquelle il s’épanouissait. Avoir grand nombre de diplômes n’était pas forcément indispensable pour acquérir le métier que l’on désirait, si Catherina était plus modeste que nous l’étions pour lui. Je ne savais ce qu’il voulait devenir, mais d’après Joan, il avait un don certain pour l’art. Si cela lui plaisait, j’étais certain qu’il pourrait percer. Il avait également en lui, le don de la parole. Je me souvenais encore des dissertations que j’avais pu lui ramasser. Avec mon assistant, nous étions d’accord sur le fait qu’il avait une plume unique. J’avais rarement entendu des écrits aussi convaincants que les siens. Je pensais même qu’avec son charisme et son art du discours, il serait capable de mener bien des personnes. Cela l’aiderait en tant qu’artiste, mais aussi pour nombre d’autres professions. Je pensais sincèrement qu’il pourrait réussir là où il voudrait aller…mais avait-il cherché à aller quelque part ? Je ne pouvais le savoir sans le lui demander et pour l’heure, poser cette question serait sans doute déplacé. Ce n’était pas ma priorité, puisque passait avant tout la préoccupation actuelle de mon cher ancien élève.

- Puis-je me permettre…tu avais besoin de quelque chose urgemment ?


Pour avoir déjà visité trois boutiques précédemment, je me doutais qu’il devait y avoir une urgence, ce qui expliquerait également cette aura étrange qu’il avait. Bien que quelque chose semblait clocher, il restait d’un calme légendaire…ou n’était-ce qu’une impression ? Peut-être quelqu’un l’avait sommé d’une commission, et qu’il devait revenir au plus tôt.
J’avais posé ma question de manière à ce qu’il n’ait pas à m’en dire trop s’il ne le désirait pas. Ses motivations le regardaient si elles étaient personnelles et qu’il ne voulait pas les partager. Il pouvait même ne pas répondre à ma question après-tout, il serait tout à fait dans son droit.

- Mes connaissances sont hélas très faibles en ce qui concerne les boutiques de confiseries Londoniennes, mais peut-être que ce que tu cherches est trouvable ailleurs ?

Je restais toujours très précautionneux dans mes dires, je ne voulais pas risquer de m’aventurer sur un chemin où l'on ne m'invitait guère et surtout je ne voulais pas froisser Catherina alors que j'espérais sincèrement pouvoir rester encore un peu avec lui pour peut-être en apprendre plus sur ce qu'il faisait aujourd'hui et s'il se complaisait dans son quotidien.


Tysha K. Reed
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Dim 13 Mar - 11:09
Un sourire doux et sincère accueille ma question. Je ne m'en formalise pas et même si je l'entends, je n'accorde pas beaucoup d'importance à ses mots. C'est la couleur de sa voix qui m'intéresse. Je tourne la tête vers un mur à la couleur unie et les traits de peinture entre le magenta et l'indigo barre ma vision avec douceur. Je plisse mes yeux et j'ignore ma connasse de conscience qui fait encore des siennes. Je ne suis pas habitué à une douceur sincère ? Ben voyons, c'est celle-là même que Teddy et Candy me montrent. Je finis tout de même par tourner la tête vers mon ancien professeur de philosophie.

Je ne réponds pas à ses mots. Je ne sais que trop bien ce qu'ils amènent implicitement et il est absolument hors de question que je m'aventure sur le terrain glissant qu'est la vie que je mène actuellement. J'ignore ma connasse de conscience ai-je dit. Je respire profondément et je noue mes bras sur mon ventre. Je n'ai absolument pas peur de décevoir qui que ce soit par mes choix, vu que ces derniers ne concernent que moi de toutes façons. Lorsque la couleur de sa voix disparaît, signe qu'il se tait, je ferme les yeux. J'entends distinctement tous les sons autour de moi, mais je n'en distingue pas la couleur. Ou du moins, elle est si quasiment transparente ( wanker mind ta gueule ) que je peux largement passer outre.

Un léger soupir s'échappe de mes lèvres. Je me rappelle encore de mon désir de devenir dessinateur et peintre et voyager à travers le monde, puis celui d'être infographiste et artiste, pour ainsi ne pas me fermer à un seul domaine de l'art. Le Land Art est sans doute ce qui m'intéresse le plus, il faut aussi dire que celui que montre Goldworthy est beau, dans le sens noble et pur du terme. Être artiste et compositeur est sans doute ce qui me correspondrait le mieux, vu le nombre de sonates, de concertos, d'oratorios et autres que j'écris. ... C'est impossible maintenant, ce serait la porte ouverte à tous ceux qui veulent ma mort ou que je devienne inapte à tout ce qui concerne l'informatique. Il est hors de question que j'abandonne l'informatique, plus encore maintenant. Et de toutes façons... la peinture, le dessin, la musique, je les pratique encore.

Je secoue la tête et regarde le ciel nuageux qui ne semble ni vouloir laisser le soleil s'imposer, ni vouloir nous cracher à la tronche. J'aime beaucoup ce temps. Ce gris est considéré comme morne, je le vois comme doux et apaisant. La couleur de la voix de Mr Swanson me fait lentement baisser la tête, jusqu'à ce que mon regard se plante dans ses yeux. Juste quand sa question se termine, une tâche d'indigo tellement immonde que cette nuance ne devrait pas se nommer indigo ( cette nuance est trop belle pour cela ), dû à un bruit de frein que mes yeux ignorent copieusement, apparaît dans mon champ visuel. Je me masse légèrement les tempes, toutes ces couleurs font naître un léger mal de crâne.

Une fois de plus, je ne réponds pas à sa question. Non, vous ne pouvez pas vous permettre de me proposer votre aide. Je n'ai pas besoin d'aide, aussi douce soit-elle. Wanker mind ta gueule j't'ai pas sonnée. Mes bras se décroisent et retombent le long de mes flancs. Mes yeux se posent sur mon épaule droite et la lanière soutenant l'étui de mon violon est toujours présente. Un soupir de soulagement s'échappe de mes lèvres. Le silence qui se fait brusquement est une brise lente qui enlève encore plus lentement mon exaspération, et ce constat fait revenir le coeur du problème violemment à mon cerveau. Je n'ai plus de sucette au citron vert.
Dans quel monde vit-on sans sucettes au citron vert ? Aucun, c'est impensable. Je suis soudainement agacé d'avoir laissé mes pensées tergiverser autant.

Faut croire que Mr Swanson t'a touché plus que de nécessaire, bastard.
Si c'est pas mignon...
Eh, pourquoi tu ne le tues pas, bastard ? T'aurais tout à y gagner.
Aller, juste à côté d'une confiserie c'est le must bastard !
... C'est un ordre, bastard.
Maintenant, de suite, dans la milliseconde près.
Et ici mêm-...

- Non mais ça va pas...

Ta gueule wanker mind, don't you dare talk again bitch. ... Mes yeux se plissent. J'ai pensé une phrase à voix haute. ... Oh et puis j'm'en fous. Merde. Excédé, je m'apprête à tourner les talons. Pas question que ma connasse de conscience refasse encore une fois des siennes, et tant qu'à lui parler à haute voix pour me défouler autant que je sois seul. ... Il me faut mes sucettes au citron vert. Je vais décéder mentalement. Pas question que je donne raison à l'autre connasse de psychiâtre. Je me tourne déjà pour poursuivre ma route vers une énième confiserie ( qui n'a pas intérêt à être fermée ), mais une nuance située parfaitement entre l'indigo et le magenta m'interrompt. Mes yeux se déplissent, mon corps s'arrête dans son geste. Sucettes au citron vert.

- Vous avez des sucettes au citron vert chez vous, monsieur Swanson ?

Mon soprano de fillette de quatre ans n'a pas changé, toujours aussi cristallin et chantant, mais un ton d'espérance impatiente propre aux enfants désireux d'avoir ce qu'ils veulent s'insinue dans ma voix... et se mêle à un calme olympien qui n'est pas du tout de façade. Sucettes au citron vert. J'espère qu'il m'en reste encore chez moi, même si c'est plus grave qu'il n'y en ait pas dans mon sac. Une de mes mains se porte à ma tempe et la masse. Je suis un candylimeman. C'est déjà mieux que d'être un toxicoman. Mon nez se penche vers mes vêtements et je respire avidement mais silencieusement les senteurs de pivoine mêlées à celles de grenade que mes habits et mon cou m'apportent.

Je reste ainsi pendant de longues secondes, de longues minutes peut-être, jusqu'à temps que je sois entièrement apaisé. Ma respiration se fait alors plus intérieure et un sourire en coin orne mes lèvres. On est calme ? On est calme. Mon visage retrouve ainsi toute sa froideur et je regarde monsieur Swanson. Mon sourire disparaît même s'il ne le voit pas et mon nez va respirer encore une fois mon odeur. On est calme. Apaisé... On est calme ? On est calme.

- Le plaisir de cette rencontre est partagé.

Je déclare de ma voix étrange, beaucoup plus calme à présent. Pour la énième fois, mon nez respire mon odeur et apporte sérénité et quiétude à mon cerveau. On est calme ? ... On est calme.

©Riva

Eugène Swanson
Eugène Swanson
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Jeu 14 Avr - 9:03




Le silence qui suivit ma première question avait de quoi me laisser perplexe. Mais cela ne faisait que me rappeler le comportement de Catherina lorsqu’il côtoyait encore l’établissement scolaire. Il avait cette attitude souvent distante et silencieuse, comme s’il était constamment plongé dans ses pensées plus que dans le monde réel. C’était une chose que je me souvenais avoir appréciée chez lui à l’époque puisqu’il ne faisait ainsi pas partie de ces élèves perturbateurs qui s’amusaient parfois à troubler la sérénité du cours et en même temps cela révélait, ou plutôt laissait supposer qu’il  devait sans doute être une personne qui offrait une place importante à la réflexion. Or, il était bien connu que j’étais l’un des premiers à enseigner l’importance de celle-ci. Toute réflexion mérite d’être pensée longuement afin d’être sage.

- Non mais ça va pas...

Parfois, la situation présente semblait m’échapper alors que j’entendais Catherina prononcer des mots qui ne faisaient pas sens à la conversation, comme s’ils ne m’étaient en réalité pas adressés. D’ailleurs dans ces moments-là, je sentais toujours sa voix dévier légèrement, comme si ces paroles ne m’étaient réellement pas destinées. C’était assez étrange comme sensation et je devais avouer que je ne savais pas comment l’appréhender. Devais-je répondre à cette phrase que je ne comprenais pas ? Ou au moins y réagir, mais comment ?  Me faisait-il comprendre par là que mon attitude avait été déplacée et que je venais de l’offenser ? Si c’était la réponse à ma question, alors je devais sans doute interpréter cela comme un refus de mon aide et sans doute souhaitait-il également que je me retire. Je l’entendais déjà tourner les talons dans une intention non-cachée de s’éloigner. Je l’avais donc réellement dérangé ? Je m’en voulus. N’étais-je pas en train de gâcher la miraculeuse chance que j’avais eu dans ce parfait hasard de retrouver en pleine rue un élève dont je n’avais plu entendu parlé depuis si longtemps ? Mon opportunité d’avoir des nouvelles de lui ne s’envolerait-elle pas au loin en même temps que ses pas ? Ne devrais-je pas l’arrêter et tenter de savoir s’il ne voudrait pas m’accorder un peu de temps pour discuter, aujourd’hui ou un autre jour ? Il n’y avait rien de mal à essayer plutôt que de se plonger par la suite dans les regrets.  Mais je préférais tenter de persister pour trouver encore une solution à son problème. Ce qui fut fructueux en un sens, car je sentis sa présence s’arrêter instantanément que ma phrase fut prononcée.

- Vous avez des sucettes au citron vert chez vous, monsieur Swanson ?

Surpris par cette question, je me laissais un peu de temps pour y répondre. Je découvrais ainsi que c’était donc des sucettes au citron vert qu’il recherchait si ardemment, mais je ne m’attendais pas à ce qu’il me demande si par hasard j’en avais chez moi. Avait-il renoncé à l’idée de chercher dans une boutique ? Ou peut-être les avait-il déjà toutes visitées et celle qui se trouvait à notre proximité avait été sa dernière chance. Je devais avouer que j’ignorais totalement le nombre de confiseries qu’il y avait dans Londres, mais je doutais qu’il y en ait aux quatre coins des rues.

Mais avais-je seulement ces douceurs chez moi ? Bien que mon esprit commença à faire l’inventaire de ce que contenaient mes placards, je savais pertinemment que je n’avais pas de sucettes, vu que je n’en consommais pas. En revanche, le souvenir d’une boite de pastilles au citron vert me revint. Elles étaient utiles contre l’anxiété et la nervosité et je me souvenais en avoir déjà donné à quelques-uns de mes étudiants stressés avant un examen. Tout comme je gardais toujours de la réglisse pour au contraire leur donner de l’énergie lors des périodes fatigantes de révision. Sous la forme de bonbons ils étaient souvent plus enclins à goûter ces parfums particuliers. Après tout les friandises étaient plus agréables que des médicaments, et bien que moins fortes, elles avaient tout de même leur efficacité.

- Je regrette, je n’ai pas de sucettes, cependant j’ai des pastilles à sucer au citron vert, cela pourrait peut-être faire tout de même l’affaire ?


Je ne savais pas si la forme de la douceur était cruciale pour lui, mais il me semblait à mon humble avis que le plus important demeurait être le goût. Les pastilles restaient très similaires aux sucettes. J’espérais donc que cela conviendrait à mon jeune ancien élève pour ainsi mettre fin à son problème.

-Si cela te convient, que dirais-tu d’en profiter pour venir boire un thé chez moi ? Je serais très heureux de t’accueillir si tu as un peu de temps. Sauf si tu es occupé bien entendu, je ne voudrais pas te retenir.

J’offris un de mes doux sourires en direction de là où je ressentais la présence de Catherina. Était-ce mal de tirer légèrement avantage de la situation pour lui proposer de rester avec moi un peu plus longtemps qu’il ne l’aurait fait autrement ? Sa question implicite n’avait-elle pas déjà suggéré cela ? Dans peut-être un peu de faiblesse je laissais cependant ma curiosité guider mes intentions. J’avais tant hâte d’en apprendre un plus sur lui, sur sa vie d’aujourd’hui…Et puis je n’avais pas si souvent que cela l’occasion d’avoir un peu de visite dans mon appartement. J’avais beau être une personne sociable, il m’arrivait rarement d’avoir des invités. Pourtant ce n’était pas quelque chose qui me dérangeait, bien au contraire, un peu de compagnie était toujours agréable. Cela me faisait plaisir. Vraiment plaisir.

Mais il était vrai que mes connaissances se limitaient généralement à mon cercle d’élèves et de collègues du lycée et de l’université, et ce genre de relations dépassaient rarement les portails des établissements. Il fallait vraiment être proche pour cela, et cela faisait bien longtemps que je n’avais pas eu de grandes amitiés.

Mais le destin est imprévisible, et parfois une situation inattendue offre certaines occasions, comme celle-ci. Et j’espérais que Catherina serait d’accord de la saisir.




Tysha K. Reed
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Jeu 19 Mai - 11:36
Je ne fais que poser ma question que je vois déjà les traits du visage de mon ancien professeur se modifier en une parfaite expression étonnée. À moins que cela soit de la surprise d'un tel revirement de situation, ou encore de ce que je cherche depuis pas mal de temps déjà. Un sourire en coin, malicieux, orne mon visage même si Mr. Swanson ne le voit pas. La raison de sa surprise m'est totalement indifférente, mais voir sn visage montrer brusquement une telle réflexion... Cela me rappelle ses cours de philosophie, quand un élève posait une question pertinente et qu'il réfléchissait pour que les bons mots sortent correctement agencés de ses lèvres. Il y avait aussi une lueur de pure passion qui se voyait, qui était sublime, bien qu'il soit normale que je ne la retrouve pas ici. On n'est pas tous drogués aux bonbons.

Arrêtes tes conneries, même toi tu trouves ça scandaleux quand quelqu'un n'aime pas énormément les bonbecs !
Putain mais sois honnête avec toi-même, bastard.
Tu tiens vraiment à te faire plus con que tu n'es déjà enfoiré ?
Va faire sauter Oxford Street avec ton prof dedans, là.
Ça urge, tu commences à te faire ouvert d'esprit bastard.

Je suis ouvert d'esprit de base, connasse. Ta gueule. ... J'ignore les répliques de ma wanker mind, conscient que sinon je repartirais dans un débat en parlant seul à voix haute, et une nuance pile entre l'indigo et le magenta barre ma vision et m'interrompt dans mes cercles vicieux mentaux. Pour une fois qu'une telle interruption est bienvenue, j'ai presque envie d'applaudir. Je me retiens et je laisse la froideur glaciale qui me caractérise reprendre chaque parcelle de mon corps et de mes gestes. Ce ne sont pas des sucettes au citron vert, mais ça reste des pastilles à sucer au citron vert. Dilemne. La forme est très importante, vous ne vous rendez pas compte. Je suis accro à ces sucettes blanches et vertes qui, à la fin, finissent par reproduire la parfaite nuance de vert de la chaire du citron vert. ... Je plisse les yeux. Gros dilemne.

Je m'empare de mon téléphone portable et je tape à la vitesse de l'éclair un message à l'intention de Dormouse pour qu'il se bouge le cul et aille me trouver des sucettes au citron vert, tout en vérifiant que j'ai mon stock de la maison bien fourni... et le refournir le cas échéant. Il a toute la journée pour le faire, et même s'il est narcoleptique et paresseux, je sais qu'il le fera. Dormouse et moi n'avons pas les mêmes références niveau confiserie, mais la qualité des bonbons de sa préférée vaut la mienne. Je ne sais juste pas où elle est. Va falloir que je lui demande pour éviter de me retrouver dans de telles situations merdiques. De nouveau, un large rond estompé aux bords, d'une couleur parfaitement située entre l'indigo et le magenta, apparut dans ma vision. Il est en train de demander de rester un peu chez lui ? Je penche ma tête de côté. J'ai des choses à faire cet après-midi, mais vu l'heure... treize heures et quart... je peux bien rester avec lui une heure ou deux.

- Pourquoi pas, oui ? Je ne pourrais rester que deux heures au plus, mais ce serait un plaisir.

J'imagine très bien Harlequin se foutre de moi pour employer un langage « si noblement élevé » et un petit rire cristallin me prend, doux pour une fois. Il est tellement con lui aussi... J'étire mes épaules et je les fais craquer au passage, puis j'indique oralement à mon ancien professeur de philosophie que je le suis ; je ne sais pas où il habite de toutes manières. Et je ne pense que ce soit une bonne chose que je le sache vu que je risque d'avoir une tendance à protéger la zone m'enfin... Je demanderai à un membre du DC étudiant à Millenium de le faire. Je marche aux côtés de Mr. Swanson, mon bras effleurant le sien de temps à autres. Mon geste est voulu, je veux juste lui indiquer que je suis toujours là... et que je n'ai pas envie de parler par extension. Je reçois un sms de Dormouse et je le lis. Le stock chez moi n'est pas aussi rempli qu'il pouvait l'être, mais il y en a pas mal. Il va faire mes courses et... il veut pas que je le rembourse ? Il rêve le petiot.

Mon nez se baisse vers mes vêtements pour humer mon parfum à la pivoine à pleines narines. Je suis apaisé, je vais avoir une forme dérivé de citron vert. Et ça a intérêt à respecter parfaitement le goût sinon je sens que je vais déceder de l'intérieur. Je serre mon étui à violon contre mon dos, m'assurant ainsi qu'il est toujours là. D'ailleurs, maintenant que j'y pense...

- Je risque de prendre une vingtaine de minutes pour jouer un peu de mon violon, par ailleurs. J'espère que cela ne vous dérangera pas.

Sinon j'm'en vais comme un connard et je vais jouer à Hyde Park après avoir piqué sa boîte de pastilles. Peace. Mon ancien professeur ralentit son allure et bifurque dans... vers chez lui. Bravo moi, putain ma présence d'esprit m'impressionne. Il me laisse entrer et referme derrière moi et, s'il dit quelque chose, je ne lui répondrais pas tout de suite. Je ferme les yeux et me pince l'arête du nez. Citron vert, vite, ou je vais mourir. Wanker mind ta gueule. Je les rouvre pour regarder autour de moi. On est apaisé, avons-nous dit. Je suis apaisé. Apaisé. Calme et apaisé. On est bon ? Parfait...

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Eugène Swanson
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Mar 2 Aoû - 20:15




- Pourquoi pas, oui ? Je ne pourrais rester que deux heures au plus, mais ce serait un plaisir.

Cette réponse me ravit. Il m’accordait quelques heures, et même si ça n’avait été que des minutes, j’en aurais profité avec joie puisqu’au moins je n’avais pas à faire face à une réponse négative qui m’aurait, je l’avoue, quelque peu attristé, même si j’aurais vite chassé ce chagrin, ne pouvant le forcer à demeurer en ma compagnie s’il ne le désirait point.

-  Deux heures sont plus que suffisante pour prendre un thé, je t’en remercie.

Ma voix dansait sur quelques notes joyeuses tandis que mon sourire illuminait mon visage, enjoué à l’idée d’inviter mon ancien élève chez moi. Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas partagé un petit moment complice comme celui qui nous attendait, avec quelqu’un, à discuter tranquillement mais non moins sympathiquement, autour d’une tasse de thé.

Catherina m’assura alors qu’il me suivait, et, confiant de ses dires, je m’engageais alors à nouveau dans la rue, en direction de mon appartement, reprenant le chemin que j’avais temporairement interrompu à l’instant où l’on m’avait heurté et que par la suite j’avais reconnu la voix cristalline du jeune homme. Fort heureusement, la bousculade précédente ne m’avait en aucun cas dérouté, et, je retrouvais parfaitement le sens de mon orientation. Il me suffisait d’entendre le monde autour de moi pour que je reconnaisse les infimes variations des sons qui m’indiquaient où je me trouvais. Je connaissais si bien cette rue que j’empruntais plus d’une fois par semaine qu’il m’était aisé de m’y repérer.

De temps à autre, je sentais le bras de Catherina effleurer le mien, prouvant qu’il était toujours à mes côtés, tout comme le doux parfum fleuri qui émanait de lui et venait chatouiller mes narines en même temps que les mille et une senteurs des différents magasins et lieux de la ville que nous rencontrions. Nous avions passé la dernière boutique que j’attendais avant de ne devoir bifurquer vers la droite. Mon immeuble n’était plus très loin, mais la marche, bien que silencieuse, demeurait agréable. Le jeune homme à côté de moi ne semblait pas vouloir discuter en cet instant et je respectais son choix autant que je l’en remerciais. Il m’aurait été difficile autrement de nous guider tout en me concentrant sur la conversation. Je ne profitais de ce loisir que lorsque je n’étais pas celui qui indiquait le chemin. Peut-être s’en était-il douté. Après tout, cet ancien bon élève qu’il fut dans ma classe était loin d’être idiot et il ne manquait pas de réflexions pertinentes tout comme d’un peu de jugeote.

- Je risque de prendre une vingtaine de minutes pour jouer un peu de mon violon, par ailleurs. J'espère que cela ne vous dérangera pas.

Je ralentis mes pas, soudain surpris de cette révélation, l’étonnement autant que l’admiration peignant alors mes traits. Ainsi donc savait-il jouer du violon et avait-il son instrument avec lui ?

- Oh pas le moins du monde ! Je serais plus que ravi d’avoir l’honneur de t’entendre jouer. J’apprécie grandement la musique.


J’aimais, comme beaucoup de monde, la musique depuis toujours, mais plus encore depuis que j’avais su développer la finesse de mon ouïe. Je me complaisais dans l’écoute de mélodies douces, entrainantes, parfois enivrantes. J’avais ainsi une préférence pour la musique classique, mais n’étais jamais contre la découverte de nouvelles sonorités. J’étais très curieux de juger l’expertise de Catherina dans le maniement de son violon, pour lequel, j’en étais certain, il devait être très doué.

Finalement, après quelques longues minutes nous arrivâmes devant l’immeuble recherché, perdu dans un quartier de Londres où une tranquillité reposante contrastait avec le capharnaüm du centre de la métropole. J’aimais cet endroit, et j’avais grand besoin de ce calme pour reposer mon cerveau qui s’était entrainé à force des années à examiner constamment le moindre bruit pour me permettre de vivre au mieux dans mon quotidien fait de pénombre.

Je vins composer le code sur les touches qui comportait des indications en braille pour déverrouiller l’accès avant d’entrainer mon invité quelques étages plus haut. C’était avec une facilité qui prouvait mon habitude que je glissais la clef dans la serrure pour ouvrir la porte de mon appartement, invitant Catherina à rentrer.

- Entre, fais comme chez toi. Oh et laisse-moi te débarrasser de ta veste ou de ton manteau si tu en as.

Je tendais l’un de mes bras vers sa présence dans l’attente de récupérer un vêtement que je pourrais par la suite accrocher sur le porte-manteau avant de me séparer moi-même de ma belle écharpe jaune et de mon manteau.
Lorsque cela fut fait, je me dirigeais alors vers la cuisine, posant d’abord le sachet que je gardais dans les mains sur le plan de travail avant d’aller ouvrir la porte d’un placard, tâtant avec attention les boîtes qui y étaient cachées. Je sentis alors, quelque part au fond, sous mes doigts une boîte métallique un peu plus petite que je ramenais vers moi, l’entrouvrant pour laisser échapper une flagrance citronnée qui ne put me tromper sur son contenu.

- Je ne m’étais pas fourvoyé, il m’en restait bel et bien.

Je rejoignis alors Catherina dont la présence n’avait pas semblé s’éloigner beaucoup de l’entrée, lui tendant la fameuse boîte.

- Voilà les pastilles au citron vert, tu peux toutes les garder si elles te conviennent. Que désirerais-tu comme thé, as-tu une préférence ? À moins que tu ne souhaites une tisane ?

Je m’osais à venir dans un geste lent et doux poser ma main sur le bras que je rencontrais pour l’inviter à s’avancer un peu plus vers le salon et le canapé qui n’attendait que de servir.

- Prend place, ne te gêne pas, je reviens avec la boisson.

À dire vrai, il me suffisait juste de passer derrière le meuble, puisqu’il n’y avait pas de cloisons entre les deux pièces, seule la salle de bain et la chambre étaient un peu plus isolées, dans le but de faciliter mes déambulations. Je pouvais ainsi continuer de lui parler sans qu’il n’ait de soucis pour m’entendre.

- La femme du marchand chez qui je me suis rendu m’a offert un gâteau au miel, aimerais-tu en goûter une part par la même occasion ? Il est excellent.

Ce n’était pas la première fois qu’elle m’en faisait un et chaque cuillère était un vrai délice, je n’avais cessé de le lui répéter. Sans doute était-ce pour cela qu’elle m’en avait fait cadeau aujourd’hui. Cette femme autant que son mari étaient décidément des personnes à la bonté incommensurable.

Lorsque j’entendis l’eau s’agiter et la bouilloire siffler légèrement, je m’en saisis pour remplir deux tasses, disposant quelques sucres sur la coupole et ramenant le tout ainsi que le gâteau sur la petite table du salon. Je vins m'installer à côté de lui, laissant tout de même un minimum d'espace entre nous pour ne pas lui donner l'impression de l'étouffer.

J’avais tant de questions, je ne savais par où commencer et j’avais un peu peur de l’assommer avec trop de choses à la fois. Mais il me faudrait bien briser la glace, ou jamais je ne saurais ce qu'il était advenu de lui aujourd'hui.

- Alors, tu sais donc jouer de la musique ? Je me souviens qu’à l’époque, il semblait que tu  avais un goût particulier pour l’art, as-tu persévéré dans cette voie ?



Tysha K. Reed
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Mer 17 Aoû - 15:11
La joie qu'irradiait le visage de Monsieur Swanson depuis que j'avais accepté sa proposition se teinte brusquement d'une lueur de surprise. Même ses pas ralentissent significativement pendant quelques secondes, accentuant l'expression de son étonnement. À croire que je lui ai annoncé le déluge en disant que j'allais grappiller vingt minutes pour jouer du violon une fois chez lui. Je m'arrête à un ou deux pas de lui, regardant son visage. Étonnement et curiosité. Curiosité ou admiration, je n'arrive pas à trancher avec l'étonnement occupant ses traits. Je penche ma tête de côté lorsque je vois une couleur pile entre le magenta et l'indigo faire les montagnes russes dans ma vision légèrement estompée de blanc ( merci la musique douce que j'écoute ). Ses mots me font plisser les yeux de prime abord, avant qu'un petit sourire n'émerge sur les commissures droites de mes lèvres. Un sourire mitigé entre malice, légèreté et sincérité. Je choisis de ne rien répondre, lui signalant juste ma présence par un effleurement de bras.

Bastard, arrête tes conneries et va exploser le L-...

Toi va te faire sauter et ensuite on reparlera. Ta gueule wanker mind. 'tain, faut que tu gâches même les moments de silence, sérieux... J'affirme mieux la prise de mon étui sur mon épaule, la froideur glaciale de mon visage regagnant mes gestes et mon aura. Maintenant que j'y repense... Il n'y a pas vraiment beaucoup de personnes qui sont au courant de ma passion pour l'écriture de compositions musicales, le violon et encore moins le piano et la flûte traversière. Pour le dernier instrument, il me semble que seul Tweedle-Dum est au courant... Je secoue la tête. Pensées inutiles, elles dégagent. Je regarde discrètement autour de moi pour me repérer. Un quartier calme de Londres, ouaip... C'est agréable. J'enlève mon casque de moitié pour vérifier la véracité de ce calme, et je finis par le faire retomber entièrement autour de mon cou. Quelques instants encore et le citron vert viendra raviver mes papilles. Gambatte, myself. Quelques étages seulement à monter et Monsieur Swanson vient composer sans aucun mal le code de chez lui, l'habitude se sent à des kilomètres, et il ouvre la porte en s'effaçant pour me laisser passer. Je rentre en faisant comme chez moi, j'espère qu'il ne regrettera pas ses mots par la suite ( y a rien de pire que ceux qui regrettent, encore plus si c'est ce genre de paroles ), et je ferme les yeux pour capturer toutes les nuances de cette teinte si particulière provoquée par la voix de mon ancien professeur.

- ... Je préfère garder ma veste, Monsieur Swanson. Merci pour l'attention, cela dit.

Le carillon cristallin de fillette de quatre ans est un peu froid, mais tout ce qui a de plus normal chez moi. ... Mes pastilles bordel. J'vais mourir. Je me meurs. Je le laisse poser ses affaires et chercher, tout en suivant ses gestes du regard. Citron vert. Une ligne rouge bordeaux apparaît dans ma vision quand j'entends un bruit de pastilles étant secouées dans une boîte et une odeur de citron vert envahit mes narines. Je ne réponds pas à l'affirmation de mon ancien professeur, me retenant tout juste de me jeter sur les senteurs de citron vert qui capturent toute mon attention. Je soupire de soulagement et en profite pour respirer profondément dans le même temps. Il me tend la boîte et je m'en empare, en fourrant fissa une pastille sur ma langue. Je m'adosse au mur le plus proche en fermant les yeux, un petit soupir de contentement s'échappant de mes lèvres. J'oublie totalement sa question sur mes préférences en matière de thé - inexistantes tant que le thé est bon -, me concentrant sur le goût de citron vert qui envahit mes papilles. Le goût est même meilleur que mes propres sucettes au citron vert, forcément il est moins sucré et plus naturel, en revanche la texture me convient moins. Mais rien que pour le goût, je passe outre la texture et je croque dans la pastille, libérant tout l'arôme salvateur dans ma bouche. Je relève ma tête vers le plafond, restant une bonne minute plongé dans le silence pour mieux déguster ce goût qui m'a manqué de toute la matinée.


T'es drogué, toi.
T'es sérieux, bastard ?
T'es un boss de gang, un gang super réputé en plus, et t'es drogué aux 'becs au citron vert.
T'as une crédibilité de merde bastard.
Va faire sauter Oxford Stree-...
Il nous écoute même pas ce con.
Il est camé, j'vous dis.
Notre bastard devient camé.
Il devient connard et camé.
Putain...

J'ignore littéralement tout sauf le goût de citron vert qui commence à déserter ma langue. Je mets une autre pastille entre mes lèvres, sentant enfin la main sur mon bras. Je recule par réflexe - sans doutes lent vu que je plane avec mon citron vert en bouche là - avant de me rendre compte que ce n'est que Monsieur Swanson. Je plisse un peu les yeux puis j'amène la boîte dans mon champ de vision. Celle-là, je la retrouverai easy. Je demanderai à Knight d'essayer une de ses petites expériences maison, et pour une fois elle ne sera en rien contrainte. J'ai une bonté d'âme de malade aujourd'hui... Je m'avance enfin pour entrer dans le salon et m'asseoir négligemment en seiza par terre, face à la table basse. Il me pose une autre question et il serait peut-être temps que je lui réponde.

- ... Pardon. N'importe quel thé me convient, je prendrais le même que vous, ça ira largement.

C'est un peu trop tard pour que je dise quoi que ce soit, de toutes façons, vu qu'il est déjà en train de le préparer. Et je doute qu'il ait mauvais goût en thé, du moins ça ne colle pas à l'image que j'ai de lui. Bon, place à la question qu'il vient de me poser.

- Et oui, je veux bien. Merci. Ah, et si possible je veux bien garder la boîte, si ça ne vous dérange pas. Merci encore pour ça. Décidément, vous ne voulez pas que je reparte, fufufu...

Et un petit ton amusé et malicieux en prime, avec ma voix naturellement étrange - surtout pour un homme de mon âge -. C'est cadeau. J'suis trop généreux aujourd'hui, faut que j'aille consulter un psych-... ouais nan. Très mauvaise idée, en fait. Une couleur argentée traverse ma vision avec légèreté en même temps qu'un bruit de tintement parvient à mes oreilles. Il est à côté de moi, sur le canapé cela dit. Good choice, au moins quelqu'un qui a des notions d'espace vital. 'tain, faudrait apprendre ça à tout ces touristes, là, qui te font chier à le piétiner h24. 'té. Je secoue doucement la tête. Faut vraiment que j'arrête de penser à des trucs complètement cons et inutiles. Je savoure la pastille au citron vert avant de m'attaquer à ce qu'il y a sur la table - et promis, j'ferais comme chez moi monsieur -, mais voilà que mon ancien professeur décide de s'attaquer à un sujet très délicat, celui que je redoute depuis que j'ai compris ce qui l'a poussé à m'inviter.

Je ferme les yeux, savourant les derniers instants où le citron vert se sent sur ma langue. En respirant par la bouche, je le sentirais dans ma gorge... pas pour longtemps avec le miel et le thé, mais bon. Autant profiter de cet instant. Je soupire doucement par les narines, intériorisant ma respiration par la suite.

- Yup, ce sont mes parents qui m'ont appris. La musique a de très belles couleurs, en particulier la musique classique, le rock, le métal symphonique et certaines branches du jazz dont le bossa nova.

Un goût particulier pour l'art, hm... Il est pas si loin de la vérité, dites donc. C'est surtout que je ne sais m'exprimer que par l'art. Ce que je ressens vraiment s'entend, dans toutes ses nuances. Enfin, par les mots aussi, mais bizarrement on comprend jamais ce que je veux quand je le dis par mes mots. Hein le vioque ? Ouais. Connard qui comprend pas que si je lui dis que je l'aime, c'n'est pas par amour fraternel... Bref. Pensées pas inutiles mais qui n'ont rien à foutre là.

- En amateur, oui, je continue de peindre. J'ai perfectionné ma technique de dessin à la pierre noire, d'ailleurs, et j'ai définitivement abandonné le fusain. J'essaie de me réconcilier avec les pastels mais c'est pas gagné - les feutres peuvent aller paître, y a pas moyen que je dessine avec eux.

Rester évasif, ne pas amener le sujet vers Joan ou Millenium. Hors de question de parler de ma brusque disparition d'un quelconque cursus universitaire, encore moins avec Monsieur Swanson vu que je suis incapable de lui mentir. Putain, j'suis beau en chef de gang avec autant de tares, sérieux... Je me sers une part de gâteau au miel et...

- ... c'est un chef d'oeuvre. Le gâteau.

Je me concentre sur les saveurs et la texture. Une histoire. Ce genre d'histoire que les chefs d’œuvre font tous naître en nous. Je ferme de nouveau les yeux, regardant ma tasse de thé. Pas de suite. Je me tais pendant deux ou trois minutes, avant de reprendre la parole, mon ton froid s'étant adouci.

- ... Où se trouve la fameuse femme du marchand qui vous l'a offert... ?

Je suis impoli, je n'ai pas cherché à prendre de ses nouvelles. Je garde ça pour me défiler, si besoin. Ou alors je jouerai du violon plus longtemps que prévu, au premier degré. Putain, qui est le con qui a donné ce sens à l'expression "jouer du violon" ?

©Riva

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Dim 11 Sep - 15:27



Le fait qu’il n’ait pas voulu se séparer de sa veste me donnait à croire qu’il n’avait vraiment aucune envie de s’éterniser dans mon appartement. Mais il devait avoir ses raisons après tout, et je n’avais pas à le juger ou à lui en vouloir pour cela. Il avait peut-être tout simplement froid, et dans ce cas un bon thé lui fera du bien et le réchauffera.

Je ne savais comment l’expliquer, mais je le sentais quelque peu absent, comme si son esprit n’était pas toujours avec moi. Je ne savais pas s’il faisait attention à mes dires, s’il ne les entendait pas ou s’il les ignorait ostentatoirement. Dans tous les cas, je ne me formalisais pas et laissais mes questions en suspens en enchainant la conversation afin de conserver une atmosphère agréable et accueillante. Je ne voulais pas le moins du monde que mon invité s’enfuie !

Finalement ma main déposée sur son bras sembla le tirer de ses songes, je sentis un léger recul et un peu plus tard il reprit la parole pour m’assurer qu’il n’avait pas de préférences en matière de thé. J’étais quelque peu étonné mais cela au moins simplifiera les choses. Était-ce d’ailleurs une attention à mon égard ? Je ne pouvais en être certain.

- Et oui, je veux bien. Merci. Ah, et si possible je veux bien garder la boîte, si ça ne vous dérange pas. Merci encore pour ça. Décidément, vous ne voulez pas que je reparte, fufufu...


- Je t’en prie. Oh, je serais effectivement attristé si tu venais à partir avant même que nous n’ayons eu le temps de discuter un tant soit peu.

C’était agréable de le sentir un peu plus joyeux tout d’un coup. Cela ravivait mon bonheur et c’était avec un grand sourire que je me dirigeais vers la cuisine pour préparer le thé tandis que la présence de Catherina s’avançait vers le salon.
Lorsque je revins un peu plus tard avec le tout vers la table basse, je remarquais que mon jeune ancien élève ne semblait pas s’être assis sur le canapé, mais plutôt par terre, ce qui était assez surprenant  mais pour le moins amusant.
C’était donc tout naturellement après l’avoir servi que j’engageais la conversation, essayant de ne pas paraître trop intrusif dans mes questions. Mais celles-ci ne semblèrent pas gêner mon interlocuteur alors qu’il y répondait avec aisance et intérêt.


- Yup, ce sont mes parents qui m'ont appris. La musique a de très belles couleurs, en particulier la musique classique, le rock, le métal symphonique et certaines branches du jazz dont le bossa nova.

- De belles couleurs…

J’avais répété tout bas dans un simple murmure ces mots qui me laissaient pensifs. Il était difficile d’oublier la particularité si unique de Catherina. Aussi fascinante qu’elle pouvait l’être, elle éveillait également nombres de questionnements. Mais je ne m’attardais pas sur ce sujet alors que le jeune homme continuait sa réponse.

- En amateur, oui, je continue de peindre. J'ai perfectionné ma technique de dessin à la pierre noire, d'ailleurs, et j'ai définitivement abandonné le fusain. J'essaie de me réconcilier avec les pastels mais c'est pas gagné - les feutres peuvent aller paître, y a pas moyen que je dessine avec eux.

Ainsi donc il avait persévéré dans l’art graphique  mais seulement en tant que passion. Il ne paraissait pas l’étudier dans le but d’en faire un métier. Je me demandais alors ce qu’il faisait de sa vie en ce moment, mais sans pouvoir assurer que ce n’était qu’une impression de ma part, il me semblait qu’il évitait habilement le sujet. Peut-être devais-je éviter de tenter de percer ce mystère tout de suite, et y revenir un peu plus tard, si Catherina se sentait alors plus à l’aise pour m’en parler. Lorsque l’on était très fier du parcours que l’on faisait, c’était souvent l’un des premiers sujets que l’on avançait lors d’une discussion. Dans le cas contraire il n’y avait que deux possibilités ; soit l’on était modeste, soit l’on préférait ne pas le mentionner car nous n’en tirions aucune fierté.

- ... c'est un chef d'oeuvre. Le gâteau.


- Je suis ravi qu’il te plaise également. J’en ferais part à la pâtissière, elle en sera très heureuse.

- ... Où se trouve la fameuse femme du marchant qui vous l'a offert... ?

- Leur boutique se situe un peu plus haut dans la rue où je t’ai rencontré. C’est une petite épicerie difficile à manquer, il s’en échappe toujours une odeur de miel très agréable. Peut-être passe-t-elle en réalité son temps à faire ces délicieux gâteaux pour attirer les clients avec ce sublime parfum


Je riais doucement, ne pouvant hélas lui décrire la devanture de la boutique pour qu’il puisse la repérer plus aisément, mais j’étais persuadé qu’il n’aurait pas tant de mal que cela à la trouver malgré tout.

- Catherina…Je me doute que tu ne dois pas vraiment apprécier que l’on te pose des questions à ce propos, ce ne doit pas être la première fois, et je le comprend tout à fait, mais en contrepartie de cette curiosité de ma part, tu pourras me poser toutes les questions que tu souhaites.


N'étais-je pas une personne bien placée pour comprendre que ce genre de questions pouvaient paraître déplacées, mettre mal à l'aise ou être détestées ? Mais je n'avais jamais eu l'occasion d'en apprendre plus autrefois, et ce, de ses propres mots. J'aurais pu me renseigner autrement, mais ce que je désirais savoir était différent. Je voulais le comprendre lui. Car nous vivons chacun les expériences que la vie nous donne, de manières différentes.

- Est-ce que tu aimes cette vision que tu as du monde ? Je veux dire...comment le vis-tu au fond de toi ? Je suppose qu’elle peut avoir ses contraintes tout comme elle peut t’apporter certaines choses. Comme ta sensibilité artistique par exemple ?

Face à cette question très personnelle, je craignais légèrement de le brusquer et de ce fait, le renfermer dans un silence, ou le voir réagir d'une manière qui ne serait en aucun cas constructive. C'était un sujet délicat, et je ne lui en voudrais pas s'il ne voulait pas en parler, ou rester très évasif à ce sujet, bien que j'espérais pouvoir, peut-être, creuser un peu plus profondément, vers les sentiments qu'il devait avoir face à tout cela.
Afin de détendre l'atmosphère et de relativiser la question, je préférais continuer une conversation un peu plus simple mais qui pourrait le mettre en confiance.

- Je suis d'ailleurs certain que tu serais capable de me peindre oralement avec grande beauté l’environnement qui nous entoure.


Je devais avouer que je n'étais pas non plus las d'entendre des descriptions que l'on pouvait me faire des paysages ou des choses quotidiennes mais pas moins inintéressantes et belles de la vie. Je me languissais d'ailleurs des récits dont Joan me faisait l'honneur sur ses tableaux qu'il me permettait ainsi d'admirer. Je n'avais aucun doute que son élève était tout aussi capable de conter magnifiquement.

- En parlant de cela…pourrais-tu me faire une faveur… ? J’aimerais connaître un peu mieux ce cher élève que j’ai pris plaisir à côtoyer au sein de ma classe. Aurais-je le droit de t'entendre …te décrire ?

Il me semble que la gêne que je devais ressentir à cette question devait se lire sans la moindre difficulté sur mon visage, malgré le sourire toujours aussi éternel que j’affichais. Il était assez rare finalement que je demande ce genre de choses aux personnes qui m’entouraient. Je le faisais souvent auprès des personnes dont j’étais proche, ou lorsque l’occasion s’y prêtait, comme maintenant. Je ne connaissais pas l’apparence physique de la plupart de mes interlocuteurs, que ce soit mes collègues, mes voisins, ou dans ce cas-ci, mes élèves. Et j’avais toujours un peu honte de le leur rappeler. Il n’y avait pas énormément de moyens pour moi de définir cela. Il me fallait soit une description orale, soit que je l’éprouve par moi-même grâce au toucher. Cette dernière solution en plus de ne m’apporter la connaissance des couleurs était celle dont je me permettais le moins. Je n’allais pas m’oser à poser mes mains sur le visage de mon ancien élève. C’était un acte qui pouvait être très déplacé, notamment s’il n’était que peu consenti, et qui pouvait se révéler assez gênant et perturbant pour la personne qui le vivait. Je n’étais cependant par pour autant totalement ignorant. J’avais pu déjà m’établir un certain portrait de Catherina avec les moyens que je disposais. Notamment sa taille et sa corpulence. Il me semblait également qu’il avait des cheveux longs, et une peau que je supposais claire du fait de son parfum. J’ignorais en revanche la couleur de ses yeux, celle de ses cheveux, et plus encore les traits de son visage. Et aujourd’hui que j’avais l’occasion d’avoir une discussion en tête à tête avec lui, je désirais vraiment pouvoir me figurer une image mentale de mon interlocuteur.




Tysha K. Reed
Tysha K. Reed
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Lun 24 Oct - 15:38
Le gâteau au miel est un pur chef d'oeuvre, une histoire gustative à elle seule. Ma pensée sort donc naturellement à voix haute, et mon ancien professeur de philosophie ne manque pas d'y répondre. Un petit sourire en coin, aussi amusé que malicieux, se peint sur mon expression toujours aussi glaciale. Il semble heureux à l'idée d'avoir bien fait, visiblement, ou bien de partager un bonheur gustatif avec quelqu'un qui l'apprécie à la même valeur. Plutôt communicative, comme bonne humeur... Je ne réponds pas à sa remarque, ce en grande partie parce qu'il n'y a rien à répondre, et je lui demande alors où se trouve la fameuse pâtissière. S'il tient à lui faire part de mes impressions sur son chef d’œuvre au miel, soit, après tout il fait ce qu'il veut, mais je souhaite également lui en faire part moi-même. Je ne peux passer à côté d'une telle artiste culinaire. Malheureusement, trop de personnes sous-estiment l'art culinaire avec toutes sortes d'arguments, des plus vicieux aux plus imbéciles ; « on mange quand on a faim et pour se remplir le ventre », « il est chef cuisiner seulement parce qu'il utilise de bons produits, pas la peine de lui attribuer six étoiles ». Si féeriques comme pensées, n'est-il pas... ? Bande d'abrutis.

J'écoute avec attention sa réponse et je hoche la tête, provoquant un froissement de tissus à cause de la capuche de mon sweat qui tombe négligemment sur mes omoplates. Grand bien lui fasse. Une odeur de miel très agréable, donc ? Je devrais pouvoir retrouver ça. Je n'ai pas un odorat très développé mais il n'est pas à sous-estimer pour autant. Et de toutes façons, c'est une indication plus que suffisante au vu des diverses boutiques et épiceries qui sillonnent cette rue. Son dernier constat m'arrache un petit rire, doux, carillonnant et discret.

- Peut-être a-t-elle trouvé une recette qui aide autrui à trouver le chemin du bonheur et qu'elle souhaite la partager, aussi. Qui sait... ?

Le chemin du bonheur, tellement plus joyeux, ludique, instructif sur la vie que le bonheur lui-même... L'argumentation est longue, et évidemment personne ne peut être d'accord dans toutes les nuances sur un sujet aussi complexe, mais j'estime que le vrai bonheur se trouve sur le chemin du bonheur, le chemin de sa recherche s'entend. Du moins est-ce là mon opinion, et un des enseignements que m'a donné le vioque sans même s'en rendre compte. Connard de vioque... Je plisse un peu les yeux et Mr. Swanson prend alors magiquement la parole, envoyant paître mes pensées plus ou moins obscures - plutôt moins que plus vu qu'il s'agit du vioque, naturellement -, et capte toute mon attention en n'employant que mon prénom. Sa prise de parole me fait reposer prudemment le peu de part de gâteau au miel qui me reste. Décidément, les saveurs de citron vert s'accordent bien avec ce gâteau, j'en toucherais deux mots à la pâtissière quand je la verrais. Je plonge mon regard dans celui, quoique aveugle, de Mr. Swanson qui ne manquera pas de le sentir, le ressentir plutôt. S'il s'approche d'un sujet sur lequel je ne souhaite pas me confier, je lui répondrais simplement que je ne souhaite pas en parler pour l'instant.

- Va pour un give & take. Je vous écoute ?

J'attends patiemment sa première question, tout en m'apprêtant mentalement à dévier le sujet sans mentir ou à dire cash que je ne souhaite pas ( ou ne peux pas, véridique suivant sa question ) lui répondre. Et quand la, ou les plus exactement, question tombe, deux sentiments m'envahissent. De une, le soulagement qu'il parle de ça et non d'un sujet beaucoup plus épineux, de deux la surprise qu'il évoque ce sujet-là en particulier ( qu'il soit au courant ne m'étonne qu'à moitié ). Un sourire amusé orne mes lèvres sans qu'il puisse le voir. Très vastes questions, dont la réponse sera forcément longue. J'attends donc qu'il ait entièrement fini de parler, et visiblement je discerne sur ses traits une envie de ne pas me brusquer ou plus exactement, peut-être, la peur d'avoir enfoncé des portes que je souhaite garder fermées. So cute, comme visage. Wanker mind, ta gueule.

*Cath, te laisse pas attendrir sous prétexte que c'est le seul prof que t'aies autant respecté. Il a peut-être changé.*
*Toi, ta gueule.*


Sa deuxième question indirecte, sur la description des lieux, me fait un peu pencher la tête du côté droit. Encore faudrait-il que je sache ce qu'il veut que je décrive. Je me contenterai de trois choses qui me parlent et qui lui parlent également, ce sera plus intéressant de confronter les descriptions de chacun. Et, perdu dans mes réflexions d'un paysage, il m'interrompt en me demandant une faveur. Je suis toujours en seiza mais l'orientation de mes genoux a changé, ils convergent désormais plus vers Mr. Swanson que vers la table basse. Je finis ma part de gâteau au miel en fermant les yeux de délice, et je garde un instant les yeux fermés, les rouvrant pour voir une certaine gêne sur le visage de mon ancien professeur. Un petit rire clair, enfantin, un peu malicieux aussi, s'échappe de mes lèvres.

- Si je m'attendais à ça... Opale* me pose souvent les mêmes questions sur la vision que j'ai du monde, même s'il me demande plutôt quelle couleur mes yeux associent à tel ou tel bruit. Il est professeur de théâtre à Millenium, je ne sais pas si vous le connaissez par ailleurs. Mr. O'Mordha. Hm... je risque de mettre du temps pour répondre à toutes vos questions, il faut dire que le sujet est très vaste.

Et que je ne peux pas tout aborder, non pas par manque de temps mais par réserve, de une, par protection envers le gang pour certains petits détails même si je doute qu'il fasse le lien ( prendre des risques inutiles sur ce domaine-là n'a jamais été mon fort, contrairement à deux abrutis ), de deux, et parce que le sujet est très vaste, de trois. Je réfléchis longuement pendant plusieurs minutes, ayant déjà décidé d'un commun accord avec moi-même que je répondrais à chacune de ses questions... dans l'ordre. Après une bonne dizaine de minutes de silence où mon visage a retrouvé toute sa froideur glaciale, une lueur de passion brille au fond de mes prunelles.

- Le meilleur moyen que j'ai pour vous faire comprendre serait de vous faire écouter une de mes compositions, mais je vais essayer de faire sans. Est-ce que j'aime cette vision que j'ai du monde ? Tout dépend sous quel angle je prends la question, et il y en a... trois majeurs, qui ne sont pas contradictoires mais complémentaires. C'est un point que je tiens à souligner, car il est important et qu'il est facilement oubliable. Il y a trois angles, donc ; scientifique, pratique et... hm... personnel, je dirais. Je vais mélanger tous ces angles pour que vous compreniez mieux mais le rendu risque d'être long. Un peu chaotique, aussi, et je m'en excuse ; je ne m'attendais pas à des questions si vastes.

Ma synesthésie musicale apporte un lot de migraines qui est loin d'être négligeable, plus encore pour moi qui suit migraineux de base. Cela apporte des douleurs aux yeux si trop de couleurs se chevauchent trop vite, surtout si les couleurs qui se chevauchent sont issues de bruits forts qui sont juste à côté de moi. J'ai ainsi dû apprendre très vite à me focaliser sur un seul bruit, un seul son, une seule couleur et ignorer tout le reste. Et, même si on ne s'en rend pas forcément compte, ça implique de développer une forte maturité mentale très tôt, trop tôt même. Ai-je le droit de dénier aux bruits qui me vrillent tant les oreilles que la vue d'exister ? Ai-je le droit de remettre en cause tous les chantiers qui font évoluer une ville ou n'importe quel autre endroit parce que les couleurs, les sons, me martèlent le cerveau et déclenchent ainsi de violentes migraines ( dont mon ouïe, qui s'est développée, et ma vision du monde ne font qu'empirer ), tellement fortes parfois que mon cerveau pousse momentanément le bouton off ? Ai-je le droit d'ignorer quelqu'un qui me parle car trop de bruits doivent être déniés pour que j'arrive à marcher dans une ruelle sans être assailli de couleurs diverses et beaucoup trop variées, jusqu'à même ne plus distinguer les couleurs issues de ma synesthésie musicale et celles qui sont naturellement autour de moi ? Ai-je le droit de vivre avec un tel handicap, qui me donnait autrefois envie de crier aux autres de me laisser dans le silence, de partir, de me laisser tranquille et ne pas me faire chier ?

À trois ou quatre ans à peine, toutes ces questions m'ont traversé. Et j'ai dû y répondre, de manière simple, au même âge. Je n'ai pas le droit de dénier aux sons qui me dérangent le droit d'exister, je peux en revanche choisir de ne pas m'y attarder. Ce n'est pas facile à décrire, c'est un état où je suis conscient d'absolument tout ce qui m'entoure sans que je n'y fasse attention pour autant. C'est semblable à de la méditation profonde, que j'ai pratiquée dès mes trois ans. Tant que mon raisonnement n'est pas égoïste, je peux choisir de me focaliser sur la voix de la personne qui me parle au lieu de me replier sur moi-même et de tout rejeter. Quant aux chantiers, si je ne peux pas les éviter et s'ils sont nécessaires pour d'autres, je peux tout simplement choisir de fermer mes oreilles à ces sons bruyants qui me font mal, fermer mes sens à eux, et écouter en silence la tranquillité de mon âme. Ce n'est pas de l'ignorance, ni du déni, simplement de l'adaptation... de l'auto-protection aussi, il est vrai. À la réflexion, c'est un état de méditation profonde, ou alors un état atteint dans des exercices de pleine conscience de soi que l'on enseigne aux débutants en taichi ou en chi-kong systématiquement. J'ai évidemment le droit de vivre, mais c'est avant tout à moi de m'adapter aux autres - et je ne peux pas non plus leur reprocher quoi que ce soit vu que ma synesthésie musicale ne peut pas se savoir en regardant mes yeux et n'est pas marquée sur mon front. Entre nous, le concept même de reproche me défrise. Bref...

Avec le temps, avec mon caractère, ma philosophie, mon entourage, j'ai pu développer une bonne maîtrise de moi-même, constante surtout, être calme et ressentir une tranquillité aussi profonde que stable malgré toutes les brimades qu'on pouvait me faire. Tout cela en toutes circonstances. Une forme de détachement, de prise de distance. J'ai su apprécier le silence, j'ai appris à en connaître les significations, les sens, les valeurs qu'il peut prendre suivant le contexte. J'ai su apprécier les couleurs à leur juste valeur, jusques dans leur plus infime nuance, même s'il y en a certaines que je n'aime pas au vu des bruits que j'y associe, il n'en reste pas moins que chaque couleur a une définition particulière chez moi. C'est ça, en fait, ma synesthésie musicale m'a permis de nuancer, de nuancer les douleurs que je peux ressentir, nuancer les événements de la vie, nuancer mes joies, mes peines, mes tristesses, et ce en me montrant les plus infimes nuances que chaque couleur peut avoir, et ce en m'apprenant à connaître les couleurs. Elle m'a appris à nuancer la vie tout en sachant l'apprécier pleinement, tout simplement. Et, pour ce dernier point, c'est une richesse qui n'a pas de prix. Cela m'a permis d'avoir plusieurs regards, cela a forgé une philosophie que je n'aurais pas eu sans elle, et même si elle m'apporte des douleurs, même si parfois elle me fait grogner, elle m'a apporté, et m'apporte encore, tant d'autres choses... Elle m'a permis de contempler des tableaux magnifiques dont les bruits environnants sont les artistes, elle m'a permis d'assister à des concerts de sons sous un autre angle, elle m'a permis d'attacher une toute autre importance à ce que je vois, ce que j'entends et par extension à ce que je sens tactilement et olfactivement et ce que je goûte.

Est-ce que j'aime cette vision du monde ? Même si, quotidiennement, ça peut être pesant, même si ça fait de moi quelqu'un de très attaché aux puretés des couleurs, à leur différence parfois infime, même si ça fait de moi quelqu'un de très attentif à chaque son, cherchant la tonalité la plus pure, le timbre de voix le plus juste, même si, par conséquent, je suis devenu très perfectionniste et assez... "puriste sur les bords" comme certains le disent, même si pas mal de douleurs, passées présentes ou futures, y sont associées, même si parfois j'aimerais devenir aveugle, tout cela fait partie de moi, tout cela m'a permis d'avoir un regard unique sur le monde, un autre moyen de le voir, de l'entendre, de l'appréhender, et j'ai également la chance de pouvoir le partager ; tout cela m'a permis de forger dans les plus subtiles nuances la personne que je suis aujourd'hui, et cela continuera de me permettre de forger dans les plus subtiles nuances la personne que je serais demain, après-demain, et tous les jours qui suivront.

Est-ce que je m'aime ? Oui, pour plein de raisons, non, pour plein d'autres raisons. C'est la réponse la plus floue, la plus juste et la plus humaine qui soit dans ce contexte. Et la même réponse s'applique pour ma vision du monde. Il m'est impossible de donner une autre réponse que celle-ci, ce dont je ne m'excuserai pas car ce serait mentir - ce dont j'ai horreur et que je n'ai fait, fais et ferais jamais.


Mon regard, durant ma longue tirade, s'est égaré vers une fenêtre, accrochant des nuages d'un gris doux, un peu foncé mais vivant, ondoyant dans toutes ses nuances, parcouru de lignes plus claires ou plus foncées. Mr. Swanson doit plutôt être étonné, c'est sans doute la première fois que je lui parle autant d'un seul coup en me livrant autant. Je bois une gorgée du thé qui a un peu refroidi mais qui est toujours chaud et je repose doucement le tasse dans un petit tintement, un petit cercle doré estompé s'invitant ainsi dans ma vision et déclenchant un sourire en coin, léger, mais un des plus sincères que j'ai pu arborer ces derniers mois.

- J'ai également eu la chance d'avoir l'entourage, l'environnement qui me convenait au mieux pour me soutenir sur le chemin que je me suis tracé. Et malgré les notes obscures, malgré les nuances que je trouve désagréables, au fond de moi je le vis bien. Ça a mis du temps avant que je ne trouve une pleine sérénité vis-à-vis de ça, forcément, mais je l'ai trouvée. Expliquer comment et pourquoi serait malheureusement bien trop long, peut-être vous expliquerai-je cela une autre fois. Quant à ma sensibilité artistique... cela a eu un impact, impossible de nier un fait si évident, mais il ne prime pas sur l'impact qu'ont eu mes parents là-dessus. Ils ont eu l'idée de me laisser m'exprimer en créant des sons, des couleurs, des formes, et disons que leur idée a pris. J'ai été plus attentif aux expressions artistiques des autres, m'amusant à les analyser, tant les couleurs que les formes et les intentions cachées, et c'est grâce à mes parents que je me suis mis à apprécier tout ça et, quelque part, à m'apprécier moi-même et ne pas tomber dans l'auto-dépréciation - tout en sachant rester humble et critique malgré tout. Le seul inconvénient à cela est que je ne suis capable de m'exprimer entièrement et pleinement que par mes compositions artistiques, qu'elles soient musicales ou picturales ( j'englobe la pierre noire, les aquarelles, les pastels et autres dans ce mot ), et je parle ici d'expression de sentiments, d'émotions, d'états d'âme, de ressenti, de mon passé, de... tout ce qui fait de moi ce que j'ai été, que je suis aujourd'hui et que je serais demain. C'est une réponse assez maladroite, mais qui me semble être la plus juste.

Je reprends une gorgée de thé, calmement et silencieusement, et je ferme un instant mes yeux. Les couleurs, les nuances, les sons, les bruits, la vue, l'ouïe, autant de sujets qui me tiennent à coeur et sur lesquels je pourrais converser sans problèmes pour peu que je me sente à l'aise. Je plonge à nouveau dans le silence quelques instants, réfléchissant à la suite de ses questions, ainsi qu'à celles qui risquent d'arriver au vu des éléments que j'ai apportés.
©Riva

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